La marque employeur, un levier pour pérenniser l’entreprise

Avec 70 % des industriels de la menuiserie concentrés sur des régions enregistrant le plus faible taux de chômage en France, ce bassin d’emploi souffre d’une pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Résultat, chacun œuvre à rendre son entreprise attractive pour assurer la continuité dans un contexte de marché florissant. La stratégie de marque employeur convoque ici des actions pertinentes et qui, in fine, profitent aux collaborateurs et candidats potentiels.

Plus l’image de l’entreprise est positive, plus elle aura de chances d’attirer les profils dont elle a besoin comme de fidéliser les meilleurs talents. Bâtir une stratégie de marque employeur constitue donc un atout stratégique majeur pour rendre l’entreprise attractive et ainsi veiller à sa pleine productivité. Dans le contexte actuel où « le salarié a repris le pouvoir », nous dit Patrice Bondy, Directeur Général de Wibaie, cette communication est devenue incontournable sur le long terme et participe du travail d’audit des Ressources Humaines. Bien menée, elle a pour incidence de réduire les dépenses liées au recrutement, de diminuer le turn-over, d’augmenter le nombre de candidatures qualifiées tout en divisant les délais de recrutement. Une logique payante à opérer sur le long terme pour fournir l’essentiel de la main d’œuvre nécessaire au bon fonctionnement de l’entreprise.

Faire face au contexte régional de conjoncture économique

Appréhender les logiques de recrutement sous le seul critère de l’offre d’emploi et du métier semble aujourd’hui assez réducteur, notamment sur un bassin d’emploi où les entreprises peinent à recruter eu égard au faible potentiel de forces vives disponibles dans la production. Un, le taux de chômage en Bretagne, Vendée et Pays de Loire, là où est concentré 70 % de l’activité du secteur de la menuiserie, se situe aujourd’hui à une moyenne de 6,5 % de la population active, enregistrant le plus faible taux de chômage en France. Deux, le bassin d’emploi est encombré et concurrencé par d’autres secteurs que sont l’industrie, l’agroalimentaire et le tourisme. Trois, la croissance à deux voire trois chiffres qu’opère le secteur de la menuiserie, boostée par le désir d’amélioration du cadre bâti qu’a suscité la crise sanitaire, génère un accroissement du carnet de commandes auquel il faut répondre pour ne pas mettre en péril le trio productivité/qualité/rentabilité de l’entreprise. Pas d’autre choix pour l’entreprise que de se confronter aux critères d’arbitrage des chercheurs d’emploi.

Ceux-là mêmes qui se travaillent autour de l’image de l’entreprise, sa notoriété, sa taille, son caractère évolutif, son implantation géographique, ses conditions de travail, son package de rémunération et son intéressement. Ce n’est donc plus au demandeur d’emploi de se décarcasser, il a désormais le choix dans cette période de déstabilisation du marché de l’emploi. Et si, le débauchage est un risque qui pèse, il favorise a contrario le secteur, les emplois dans l’agroalimentaire et le service/restauration (tourisme) étant jugés plus pénibles et précaires. Il n’en reste pas moins que le contexte est révélateur du défaut d’adéquation entre l’offre et la demande, d’une formation inadaptée aux besoins ciblés de l’entreprise auxquels s’ajoutent une mutation constante de la société et de la valeur travail, en particulier chez les jeunes. Pour ce faire, les entreprises se mobilisent activement via une stratégie de marque employeur. De quoi embarquer tous les moyens en interne comme en externe pour recruter et fidéliser !

Faire preuve d’inventivité

Pour l’embauche, il n’y a pas de solutions miracle pour les entreprises. Toutes ont recours aux mêmes mécanismes avec des partenariats et actions qu’elles dynamisent avec l’aide d’acteurs locaux (pôle emploi, agences d’intérim, communauté de communes, mairies). Dans cette logique, FenêtréA convoque l’inventivité avec la mise en place d’une visite virtuelle de ses ateliers pour attirer de nouveaux candidats. L’entreprise ayant été sélectionnée par l’agence intérim de Ploërmel, du groupe intérim Job&Box qui a fait appel à la société Artefacto, spécialiste de la réalité augmentée. L’opération a pour objectif de transporter les candidats au cœur de l’activité, de faire visiter les installations industrielles en toute sécurité et surtout de séduire de nouveaux talents en zoomant sur le descriptif du poste à pourvoir. Un parcours en phase avec les nouvelles technologies pour faire face à la pénurie de main d’œuvre.

« Nous ne sommes pas le seul employeur à avoir de gros besoins dans notre périmètre géographique. Pour ce faire, notre mission est de trouver des moyens d’innover pour attirer et donner envie aux personnes disponibles de nous rejoindre. Montrer nos ateliers, c’est aussi mettre en lumière les conditions de vie dans des espaces de travail agréables et tempérés a contrario des conditions de travail de l’agroalimentaire, principal acteur du bassin d’emploi de Ploërmel. De même que d’insister sur la promotion interne, véritable outil de motivation. La difficulté de recrutement ne concerne que les postes de production où les profils plus sédentaires se travaillent dans la proximité immédiate de l’entreprise. Non seulement ludique et différenciant, ce principe d’immersion virtuelle joue en notre faveur pour démontrer notre transparence dans une logique de « porte ouverte ». Non seulement, le candidat se projette plus facilement dans son futur environnement de travail mais cette vidéo permet de faire la promotion des métiers de l’industrie que nous représentons. Gageons que cela porte ses fruits car le pivot de l’intérim est pour nous un moyen d’asseoir le passage en CDI. Si nous avons recruté 70 salariés en 2021, la difficulté d’un recrutement reste toujours de le transformer dans la durée, » souligne Claire Tanneau, DRH FenêtréA.

Valoriser le métier

Confrontés à cette situation endémique, les industriels de la menuiserie se dynamisent. « Il n’existe plus de menuisiers expérimentés depuis 10 ans, le problème n’est pas nouveau. Raison pour laquelle nous assurons le recrutement et la formation dans nos trois ateliers-écoles au sein de l’entreprise. Les candidats sont d’abord testés pour vérifier leurs aptitudes puis, une fois sélectionnés, formés en interne pendant six mois par des salariés formateurs. Ces derniers trouvant par ce biais une valorisation de leur métier et de leur savoir-faire. Un apprentissage en douceur qui se transforme en CDI et ce, jusqu’à 50 par an. L’attractivité se veut ici naturelle sachant que nous n’exerçons aucune discrimination de sexe, d’âge, de formation, le recrutement se faisant sans CV. Venant de tous horizons y compris de l’agriculture, les postulants sont nombreux. Notre objectif étant de leur apporter des valeurs communes, des comportements gagnants et un esprit d’équipe pour les faire progresser en interne. C’est là une base solide de recrutement qui se suffit presque à elle-même. Membre du CREPI (réseau des Clubs Régionaux d’Entreprises Partenaires de l’Insertion), cette mission participe pleinement de mon travail sur la marque employeur et je m’y attelle personnellement en rencontrant chaque postulant, » dévoile Emmanuelle Legault, PDG de Cadiou Industrie.

Ici, des CDD, là des recrutements directs en CDI… A chacun sa méthode et ses outils ! « Chez FenêtréA, le journal interne d’entreprise crée le lien entre toutes les équipes, de même que nous systématisons les séances d’intégration pour ceux qui arrivent en CDI avec un tour d’horizon complet des produits, des ateliers et de la stratégie. Un parcours de formation qui se continue bien évidemment au fil du temps. Il s’agit clairement de faire de nos salariés des « ambassadeurs » afin qu’ils puissent véhiculer à l’extérieur l’atmosphère et le fonctionnement de notre entreprise. Ils sont les premiers vecteurs pour faire connaître nos métiers raison pour laquelle nous leur donnons aussi la parole sur notre site internet, » poursuit Claire Tanneau DRH chez FenêtréA.

Penser global

Donner l’envie d’avoir envie… à condition d’aller jusqu’au bout du contrat ! Un enjeu stratégique tant en au niveau du marché qu’en interne. C’est là la vision globale de WIBAIE, ex CAIB, qui entend par son changement de nom, effectif depuis le 1er janvier 2022, positionner l’entreprise dans l’innovation avec le « WI », en référence au connecté, et le « BAIE », pour la fabrication de menuiseries. Une dynamique explicite pour faire connaître le métier et illustrer les ambitions de l’entreprise via ses efforts de développement pour la conception de produits innovants, intelligents, en phase avec les nouvelles attentes du marché en termes de confort et de sécurité.

« L’entreprise s’est profondément transformée ces dernières années, pour anticiper les évolutions du marché et les besoins de nos partenaires distributeurs, ceci en regard des attentes des consommateurs. Pour intégrer ces mutations, l’engagement et la créativité des équipes ont été totales mais leur adhésion relève aussi du souci permanent d’améliorer les conditions de travail et le bien-être des salariés. Il convient donc de réduire la pénibilité en modernisant les postes de travail, l’usine en global, de travailler sur un package de rémunération intéressant avec pour ce qui nous concerne, des augmentations de salaire de 9 % négociées entre 2021 et 2022, tout en veillant à l’évolution en interne des salariés afin qu’ils ambitionnent de faire carrière. Pour ce faire, nous avons programmé un investissement de 20 millions d’euros sur 5 ans dont l’objectif vise certes à accroître la productivité mais aussi à améliorer le bien-être de nos salariés. Depuis septembre 2021, cela concerne l’aspect industriel du point de vue des équipements mais aussi des structures d’accueil avec l’agrandissement, la rénovation de nos bureaux et la création d’un restaurant d’entreprise dont l’ouverture se fera en 2023. L’approche se veut toujours participative avec des équipes projets en interne dévolues au choix des ambiances ou du mobilier et ce, sous la houlette d’une agence spécialisée dans l’agencement d’espace. Cette dynamique interne de concertation répond aux attentes des salariés et s’avère un moteur stimulant pour intégrer et agréger les équipes. Côté production, les collaborateurs sont chaque jour partie prenante de l’amélioration des process et postes de travail en vue d’optimiser la sécurité, la qualité et la productivité. Apporteurs de solutions, leurs initiatives sont valorisées par une communication en interne. Enfin, sur le plan stratégique, le plan de développement de l’entreprise WIBAIE 2025 se construit de concert avec le Comité de Direction et des équipes projets. La clé de réussite pour booster l’engagement de chacun, c’est de toujours les associer, les consulter à quelque échelon que ce soit, » explique Patrice Bondy !

A l’heure où les salariés sont extrêmement sollicités par tous les organismes de recrutement (intérim, pôle emploi…), les stabiliser rapidement dans l’entreprise revient à les fidéliser sur le long terme. Un bon cadre de travail avec des salles de sport, des vélos électriques et de belles salles de pause comme chez Cadiou par exemple ajoutent au dispositif. Autre levier, celui des salaires bien évidemment mais aussi de l’intéressement qui permet une réelle implication dans le partage des valeurs communes de l’entreprise (qualité, sécurité, productivité). Fort d’une conjoncture actuelle florissante, le climat est à une bienveillance indispensable pour veiller à la pérennité de l’entreprise. Et au final, tout le monde semble gagnant !

Article à retrouver dans L’Echo de la baie n°145