Kengo Kuma : « particuliser » la lumière

#Architectes Publié le 26 juin 2017 par LAURENCE MARTIN

Depuis plus de trente-cinq ans, Kengo Kuma explore les multiples manières d’inventer une architecture en résonance avec la nature, y compris urbaine, puisant dans sa culture japonaise pour réinterpréter par exemple la fonction de l’écran ou de la paroi mobile. Brève rencontre avec l’architecte multiprimé, à l’occasion du dévoilement du stand réalisé pour Technal sur Batimat 2017.

Kengo Kuma, quelles rencontres avec une personne ou une oeuvre littéraire, architecturale, ont joué un rôle dans votre vocation d’architecte ?

Kengo Kuma – Bien sûr, il y a les livres de Jun’ichiro Tanizaki, notamment son Éloge de l’ombre, mais aussi le gymnase olympique de Yoyogi, de Kenzo Tange*. Construit pour les Jeux de 1964, il a été un important déclencheur de ma vocation architecturale. On y voit comment Tange combine la beauté structurale avec la tradition japonaise. C’est un édifice qui m’inspire encore beaucoup ; je fais d’ailleurs actuellement tout ce que je peux pour le faire classer comme patrimoine mondial de l’Unesco. En France, la compréhension de la matérialité du béton par Le Corbusier m’a inspiré, notamment ses bâtiments comme l’unité d’habitation, à Marseille, ou le couvent Sainte-Marie de La Tourette.

kengo kuma projet

Vos bâtiments témoignent d’un rapport particulier entre extérieur et intérieur. Comment abordez-vous cette relation dedans/dehors, les ouvertures, les transparences ?

Kengo Kuma –Vous le savez, dans la ville japonaise, l’espace est limité et la densité élevée. L’une des façons de se confronter et de s’accommoder de cette extrême densité est de construire un système d’écrans, ces écrans qui, dans la maison traditionnelle japonaise, sont très délicats et permettent de contrôler cette relation entre l’intérieur et l’extérieur. J’ai beaucoup appris de cette fonction d’écran.

Lauréat du Global Award for Sustainable Architecture 2016, comment conciliez-vous nature, matériaux et innovation ?

Kengo Kuma –S’agissant du développement durable, là encore j’ai beaucoup appris des bâtiments traditionnels japonais, dont le matériau de choix est le bois issu des forêts alentours. Les constructions sont donc entourées par ces cercles verts qui relient les montagnes et les villes mais qui sont aussi la meilleure façon d’économiser l’énergie et de préserver les forêts. Au XXe siècle, les architectes n’avaient à leur disposition que le béton, l’acier, le verre. Aujourd’hui, il y a tout lieu de se réjouir de la diversité de matériaux qui nous est offerte ; il faut en profiter, notamment en sélectionnant le matériau local le plus approprié afin de créer une composition entre le lieu et le bâtiment. Par exemple pour le Conservatoire de musique et de danse d’Aix-en-Provence, j’ai particulièrement été inspiré par les oeuvres de Cézanne qui mettent en exergue la beauté de la lumière d’Aix ; c’est ce que j’ai essayé de restituer avec des panneaux d’aluminium pliés et déformés de manière à créer les effets de profondeur qui surgissent entre ombre et lumière.

Kengo Kuma parole d'architecte

Vous utilisez volontiers le concept de pixel…

J’utilise la pixellisation pour créer des effets spéciaux avec la lumière. J’ai inventé un terme : je dis que la lumière en devient « particulisée » ; cela permet de créer pour les occupants un espace, une échelle extrêmement confortable, humaine et intime à l’intérieur des bâtiments. Sur cette base, j’essaye de trouver quel sera le meilleur matériau avec la meilleure taille, le meilleur angle de pixel justement, pour pouvoir contrôler la lumière naturelle à l’intérieur du bâtiment. ❚

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