Agnès Lenoir : « Savoir aller au fond des choses, la première prérogative d’un dirigeant »

#Fabricants Publié le 27 février 2020 par L'Echo de la Baie

Prépa HEC, école de commerce, DECF… Agnès Lenoir a toujours été la “bonne élève”, désireuse de réussir ce qu’elle entreprend. Mais en 1986, cette cartésienne, experte en finance, comptabilité et gestion, se lance un pari fou : sortir de l’ornière Actiplast, une entreprise en cessation de paiement.
Récit d’une réussite.

L’Echo de la Baie : Quel était votre profil lorsque vous étiez étudiante ?

Agnès Lenoir : J’étais une “matheuse” et, en bonne scientifique, j’ai naturellement orienté mon parcours dans la finance et la comptabilité. Pour autant, j‘aimais aussi les contacts humains, et j’ai intégré AUDENCIA pour mêler, à la fois mon intérêt pour les chiffres, mais aussi pour mon goût pour le commerce, l’échange.

L’Echo de la Baie : Comment avez-vous donc été amenée à intégrer une entreprise industrielle ?

Agnès Lenoir : J’ai toujours été passionnée par l’industrie. Imaginer le nombre d’heures de travail pour créer un objet aujourd’hui aussi banal qu’une calculatrice me rend particulièrement respectueuse envers ceux qui possèdent ce savoir. Ainsi, quand mon père m’annonce, en 1986, que l’entreprise d’un de mes oncles, est en faillite, je me propose de la racheter, je relève le défi ! C’est un de mes traits de caractère. Je vois le côté positif dans toutes les circonstances, même les pires. La vie est faite d’opportunités qu’il faut savoir saisir.

L’Echo de la Baie : Comment se sont déroulés les débuts ?

Agnès Lenoir : Cette entreprise n’avait pas un fonctionnement structuré. A mon arrivée, j’ai donc élaboré une analyse de marché et créé un système de gestion des stocks. J’ai également fixé des prix de revient et – petite révolution – fait entrer le premier ordinateur ! A l’époque, l’entreprise n’exportait pas ses produits et concentrait toutes ses activités dans le domaine de la chaussure. Progressivement, je l’ai fait évoluer. La chaussure ne représente plus que 5% de nos activités aujourd’hui et nous réalisons plus de 40% de notre chiffre d’affaires à l’export.

L’Echo de la Baie : A quel obstacle majeur vous êtes-vous heurtée lors de votre prise de fonction ?

Agnès Lenoir : Le plus important était le manque cruel d’argent. Je me revois prendre ma voiture pour aller déposer à la banque chaque chèque qu’envoyait un client ! De cette période, j’ai développé une vision très claire de ce que doit être la mission d’un chef d’entreprise : préparer l’avenir, car personne ne peut avoir une vision prospective, excepté le dirigeant. Toujours motiver l’équipe : c’est fondamental pour que chacun garde le cap, même dans des moments de doute. Assurer le quotidien, d’un point de vue financier. Et enfin, être rentable, car sans rentabilité, point de développement !

L’Echo de la Baie : Le fait d’être une femme influe t-il votre style de management ?

Agnès Lenoir : Oui, c’est inévitable. Par exemple, je pense être plus pragmatique qu’un homme. Dans les choix stratégiques que j’opère, je ne me lance pas dans toutes les directions, je sélectionne les actions que je souhaite mettre en place. Je pense qu’un homme serait davantage tenté de les démultiplier. La raison de cette sélectivité est simple : j’ai une famille et des enfants pour lesquels je me devais d’être présente. C’est pourquoi une femme dirigeante doit pouvoir cibler ses actions pour gagner en efficacité et en temps.

L’Echo de la Baie : Avez-vous déjà dû faire face à des remarques déplacées, inhérentes à votre statut de femme dirigeante ?

Agnès Lenoir : L’industrie, du moins dans les PMI, est un monde très respectueux et je n’ai jamais dû recadrer une personne qui m’aurait adressé une réflexion misogyne. Nous sommes centrés sur le travail, les résultats. Et lorsque vous rencontrez le succès, que vous soyez un homme ou une femme ne change rien. L’important est de rester fidèle à ses valeurs et, surtout, de savoir aller au fond des choses. C’est pour moi la première prérogative d’un dirigeant. Qu’il soit homme ou femme, il doit pouvoir analyser un problème, remonter à ses origines et prendre les décisions correctives. Et cette mission, seul un dirigeant peut l’assumer.

L’Echo de la Baie : Quels conseils donneriez-vous à une femme souhaitant exercer des fonctions de direction d’entreprise ?

Agnès Lenoir : Pour être 100% disponible pour son entreprise, il ne faut donc pas hésiter à s’entourer de personnes dignes de confiance qui vont gérer les enfants, la maison… Je pense qu’une femme a davantage besoin de se créer un équilibre de vie pour performer dans des fonctions de direction. Sinon, elle n’a jamais l’esprit totalement serein. Je lui recommanderais aussi de sortir de son bureau pour rencontrer d’autres personnes, connaître les nouvelles tendances… Pour ma part, je fréquente régulièrement le Club APM experts. Cela fait un bien fou d’échanger avec d’autres dirigeants et j’ai aussi beaucoup appris à leurs côtés. Quand je ne travaille pas, je lis, je voyage, je pratique le Pilates, et je visite des expositions car je suis une passionnée d’art. Prendre du temps pour soi, c’est fondamental.

Pour voir l’article :

Lien Calameo Fichier PDF


Vous aimerez aussi

Abonnez-vous

Profitez du magazine où et quand vous voulez. Abonnements papier et offres 100% numériques sur ordinateur, tablette et smartphone

Je m’abonne à partir de 78 €

Déjà abonné ? Identifiez-vous

Contact

Tel. +33 (0)2 43 59 90 80